
L’artiste-horloger François-Paul Journe et le chef étoilé Dominique Gauthier
Véritable joyau du patrimoine bistrotier de la Cité de Calvin et dernier témoin des grands cafés et restaurants de la rue du Rhône de la fin du 19e siècle, la Bavaria renaît en «F.P. Journe Le Restaurant», après une longue rénovation et mise aux normes.
Dans le bâtiment de la rue du Rhône 49, construit après le milieu du 19e siècle, le rez-de-chaussée abritait d’abord une agence bancaire avant qu’Adolphe Neiger n’y ouvre une brasserie spécialisée dans les bières allemandes. D’où son nom: la Bavaria, qui évoque l’ambiance des Bierstube, avec boiseries, grands miroirs et panneaux présentant de petits oiseaux, des scènes campagnardes ou de beuveries.
Au sortir de la Première Guerre mondiale, l’enseigne devient rapidement le «stamm» des membres de la toute jeune Société des nations (SDN), fondée en 1919, qui tiennent leurs assemblées à la Salle de la Réformation, située à un pâté de maison. Et comme cette dernière ne dispose pas de buvette, ministres, chefs d’Etats et autres journalistes se retrouvent ensuite à la Bavaria pour étancher leur soif.
Derso et Kelen, deux caricaturistes hongrois réfugiés à Genève, y croquent régulièrement tout ce beau monde. Parmi leurs dessins, on reconnaît des fidèles clients: le Français Aristide Briand, président du Conseil, le Britannique Neville Chamberlain, chancelier et ministre de la Santé, ou l’Allemand Gustav Stresemann, ministre des Affaires étrangères. Au fil des ans, près de 200 croquis orneront les murs de la Bavaria. Ils font aujourd’hui partie de la collection privée du banquier Ivan Pictet.
Après plusieurs rénovations, le palais de la bière devient «Le Relais de l’Entrecôte», en 1982. Mais en 2006, ce haut lieu est le théâtre de plusieurs bagarres juridiques, jusqu’à ce que les autorités genevoises ne sauvent cette enseigne en 2012 en classant le décor du bistrot, des boiseries au plafond en passant par les chaises, les tables et les miroirs.
En 2015, l’ex-Bavaria devient le «49 Rhône», puis «Marjolaine» quand, en 2018, les propriétaires appellent à la rescousse Philippe Chevrier, qui en fait une trattoria haut de gamme. Fermée en mars 2019, l’établissement fait alors l’objet d’une longue rénovation pour devenir «F.P. Journe Le Restaurant», avec à sa tête le chef étoilé Dominique Gauthier et l’artiste-horloger François-Paul Journe, épicurien amateur de vins fins.
23.11.2023