L'Italie est traditionnellement un grand marché horloger, actuellement le quatrième en valeur pour l’industrie horlogère helvétique, et les Italiens sont des amateurs avertis de produits horlogers. Ces deux paramètres font la joie des fabricants suisses… mais pas seulement. Les contrefacteurs sont aussi très actifs dans la péninsule, profitant d'une main d'œuvre très qualifiée en joaillerie-orfèvrerie et faisant preuve d'un savoir-faire indéniable.
Début 2000, sur la base d'un faisceau d'indices, la Guardia di Finanza a mis sur pied une opération d'investigation appelée GoldenEye. Etant donnée l'ampleur du trafic mis à jour, cette affaire a rapidement pris une envergure internationale pour aboutir en septembre dernier au démantèlement d'un vaste réseau de contrefacteurs actifs depuis plusieurs années avec des ramifications dans toute l'Europe.
Les fausses montres étaient fabriquées à Hong Kong (à l'exception des pièces en or, produites en Italie), puis importées en Suisse ou en Autriche par différentes sociétés d'import-export, avant d'être redirigées sur l'Italie. Là, elles subissaient les opérations de marquage avant d'être écoulées au détail par un réseau couvrant l'ensemble du territoire. Les flux financiers étaient dirigés sur la Chase Manhattan Bank, via la Banca di Lugano.
Au terme de l'opération, la Guardia di Finanza a mis la main sur plus de 40'000 pièces imitant les modèles les plus prestigieux de l'industrie horlogère helvétique, démantelant au passage trois laboratoires clandestins complètement équipés. Quinze personnes ont été appréhendées et sept voitures ont été séquestrées. Sur commission rogatoire, la police tessinoise a pu procéder au blocage des avoirs déposés à Lugano. Les 400'000 francs trouvés à cette occasion démontrent bien l'ampleur de l'organisation criminelle. La procédure aujourd'hui suit son cours et pourrait bien déboucher sur d'autres "découvertes".
Il s'agit là d'un cas d'école qui démontre, si besoin était, la nécessaire collaboration des autorités par delà les frontières nationales, ainsi que les moyens à mettre en œuvre. Ecoutes téléphoniques, interception de messages électroniques, analyse des flux financiers, perquisitions, filatures, etc. Lorsque la lutte anticontrefaçon est traitée comme la lutte antidrogue, les résultats ne se font pas attendre. Il s'agit donc bel et bien d'un tournant dans la perception par les autorités du délit de contrefaçon. On ne peut que s'en féliciter.
22 novembre 2001